Photo d'une jeune jordanienne dans l'Ideas Box
Projets - 1 avril 2019

Décrochage scolaire : de nouvelles manières d’apprendre en Jordanie

En septembre 2018, Bibliothèques Sans Frontières et l’ONG Jordanian Hashemite Fund for Human Development (JOHUD) se sont associées pour installer une Ideas Box dans l’un des centres communautaires d’Amman, capitale de la Jordanie. Chaque jour, enfants et adolescents en décrochage scolaire s’y retrouvent pour participer à des ateliers thématiques imaginés par notre équipe et des professeurs : de l’alphabétisation à l’anglais, de la protection de l’enfance à l’égalité femmes-hommes. Rencontre avec Narjis, Areej et Hanan, animatrices de l’Ideas Box.

En Jordanie, le coût des transports est très élevé. L’une des conséquences directes de ce constat est que de nombreux jeunes ne vont pas à l’école. Et notamment les filles, leurs parents craignant qu’elles ne soient harcelées ou agressées sur le chemin. Quant aux garçons, le manque de moyens économiques les contraint souvent à travailler. Enfin, celles et ceux qui ont très tôt quitté l’école ne sont pas toujours autorisés à se réinscrire, ce qui les exclut du système éducatif officiel.

Pour pallier ce décrochage scolaire, JOHUD a mis en place plusieurs centres d’éducation non-formelle à Amman, offrant la possibilité aux jeunes de suivre un parcours divisé en trois cycles et de recevoir un diplôme. C’est dans le centre de Marka, dans les faubourgs d’Amman, qu’une Ideas Box a été installée en septembre 2018.

Depuis l’arrivée de la médiathèque mobile, notre équipe a formé plusieurs animateurs du centre et collaboré avec les enseignants, ainsi amenés à réfléchir à de nouvelles méthodes d’apprentissage. Utilisée non seulement par ces derniers qui en intègrent les outils et les ressources au sein de leurs cours, l’Ideas Box a également permis de mettre en place des ateliers thématiques.

« Avec l’Ideas Box, nous voulons montrer aux élèves et aux professeurs qu’il y a de nouvelles manières d’apprendre et d’enseigner, plus interactives et plus dynamiques. Qu’il est par exemple possible de comprendre le système solaire en jouant. » explique Narjis, responsable informatique et formatrice au sein de l’équipe de Bibliothèques Sans Frontières.

Photo d'un atelier dans le centre de JOHUD

Deux fois par semaine, les étudiants peuvent en effet participer à deux ateliers facultatifs au sein de l’Ideas Box : l’un scientifique, l’autre consacré à l’écriture de bandes dessinées et aux films d’animation, la thématique de ces ateliers changeant environ tous les deux mois.

« La première séance de l’atelier scientifique portait notamment sur la création de la Terre : elle devait initialement durer deux heures, il nous en a fallu quatre de plus tellement il y avait de questions.

Celles et ceux qui n’avaient d’abord manifesté aucun intérêt pour l’Ideas Box s’investissent maintenant de plus en plus. Ayan, l’un des étudiants, était par exemple très difficile à canaliser. Il ne voulait ni participer aux ateliers ni qu’ils se déroulent correctement, et ne faisait que perturber ses camarades. Certains enseignants ne voulaient même plus le laisser venir au sein de l’Ideas Box. Nous nous y sommes alors formellement opposées car elle doit être ouverte à tous. C’est à nous, animateurs et professeurs, de comprendre pourquoi l’élève est aussi perturbateur.

C’est alors qu’une fois, nous avons organisé une activité manuelle – à laquelle Ayan participait – où chacun devait créer une carte pop-up. Ce jour-là, nous le regardions tous : il était très silencieux, soucieux de bien faire et disponible pour les autres. C’est comme s’il était une nouvelle personne. Depuis, nous avons réalisé qu’il préférait travailler seul que de s’asseoir et d’écouter l’enseignant. L’équipe de JOHUD est maintenant beaucoup plus attentive à l’intégrer dans les ateliers manuels. » poursuit Narjis.

Régulièrement, les animatrices Areej, Hanan et Narjis organisent des séances de discussion avec les élèves et les enseignants du centre communautaire, pour recueillir leurs commentaires et leurs besoins, afin d’améliorer les ateliers mis en place. Lorsqu’elle décrit le déroulement de celles-ci, Areej souligne l’intérêt et l’engagement croissants des étudiants pour l’Ideas Box :

« Les jeunes ne viennent pas seulement pour les tablettes. Les romans, les histoires vraies et les manuels sur la confiance en soi plaisent aussi énormément. Récemment, ils ont commencé à nous demander s’ils pouvaient emprunter les livres afin de les apporter chez eux. C’est une excellente chose, surtout venant d’enfants qui lisent peu. »

Pour Hanan, l’Ideas Box est une « fenêtre sur la connaissance », un espace où s’informer chaque jour et s’engager. Grâce à elle, notre équipe et les enseignants de JOHUD ont introduit de nouveaux outils ainsi que des ressources physiques et numériques dans le centre, invitant chacune et chacun à penser différemment.

Un texte écrit par Paola Abril

Photos prises par Agnès Montanari

En Jordanie, neuf Ideas Box et sept Ideas Cube sont installés dans plusieurs villes et camps de réfugiés. Chaque jour, ces projets redonnent la parole à des personnes qui en ont été trop longtemps privées. Grâce à votre soutien, ce seront toujours plus de communautés que nous pourrons atteindre : faites un don !

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