Rafi et sa femme Aida ont quitté l’Afghanistan début 2016, fuyant les violences à répétition des talibans et l’insécurité grandissante. Dans leurs sacs ? L’espoir d’un meilleur avenir en Europe. Après avoir passé plus de deux ans en Italie, la famille a déménagé en France, dans le centre d’hébergement d’urgence de Nanterre, géré par l’association Aurore. Au quatorzième étage du bâtiment, vue sur la Défense : l’Ideas Box, où chaque jour notre équipe d’animatrices organise des ateliers et des cours de français. Aujourd’hui à Marseille, Rafi nous raconte son quotidien en France et comment cette bibliothèque a favorisé son intégration.
Originaire de la province d’Herat, à l’ouest de l’Afghanistan, Rafi commence à coopérer en 2004 avec les forces maritimes afghanes. Alternant entre plusieurs postes pendant quelques années, il devient finalement interprète en 2010. Parallèlement journaliste au sein de Radio Bhaijaan, il recueille aussi régulièrement informations et témoignages des habitants alentour. Sur la grille des programmes, plusieurs émissions relaient chaque jour l’héroïsme des forces armées afghanes. Inquiété par les premières menaces proférées par les talibans envers ses collègues et camarades, Rafi prend alors la décision de quitter le pays avec sa femme, direction l’Europe.
« En Afghanistan, j’avais tout : ma famille, un bon salaire et une belle maison. Mon seul problème était le poste que j’occupais, c’est pour cela que j’ai dû partir ! J’en souffre énormément aujourd’hui, ma femme également. Nous avons tout perdu : notre pays, notre vie. »
Comme de nombreux migrants, Rafi et Aida arrivent d’abord en Italie, où leur fils naît quelques mois plus tard ; Fayaz a maintenant deux ans. Ils font alors rapidement face à la complexité de l’administration italienne et du droit européen. Après plus de deux ans à Milan, la famille décide de suivre les conseils de quelques connaissances et de partir en France. Paris s’impose alors, l’effroi aussi.
« Des milliers de migrants dormaient par terre, dans la rue, ce qui ne semblait inquiéter personne. J’ai tout de suite pensé que c’était la plus grande erreur de ma vie. En Italie, au moins, nous avions un endroit où dormir. Les premiers jours ont été particulièrement difficiles. Nous avons passé trois nuits dehors, au même endroit, il faisait vraiment froid. Heureusement, nous avions un enfant : nous avons donc été très vite orientés dans le centre d’hébergement d’urgence de Nanterre. »
Confrontée à un nouvel environnement, la famille doit alors recomposer et se réinventer.
« Le début a été très difficile, notamment à cause de la langue et de la culture. Tout était différent et nouveau pour moi. Mais j’ai fait de mon mieux pour m’intégrer au groupe, pour parler aux autres résidents du centre. Après quelques semaines à Paris, j’avais déjà beaucoup d’amis. »
La plupart de ses amis, Rafi les rencontre au sein de l’Ideas Box, installée depuis trois ans au quatorzième étage du centre d’hébergement. Ils sont afghans, soudanais ou érythréens. Ils sont étudiants, professeurs ou avocats. Comme lui et Aida, dans l’attente d’un titre de séjour.