Les difficultés quotidiennes sont nombreuses : s’orienter sur une carte géographique, commander au restaurant, retirer de l’argent au distributeur automatique, faire ses courses, ne pas connaître sa date d’anniversaire ou son âge, lire l’heure ou envoyer des mails. Rendant l’insertion sociale et professionnelle très difficile, d’autant plus avec la transition numérique, les évolutions du monde du travail et la dématérialisation des services administratifs, poussant les personnes vers toujours plus d’autonomie.
Très souvent, honteusement, les personnes concernées usent alors de stratégies de contournement : un oubli de lunettes, un mal de poignet.
« L’illettrisme se tait. Quand tu as cette difficulté-là, tu en parles peu, tu la caches. C’est une réalité : tu dis plus facilement ‘je suis nul en mathématiques’ ou ‘je ne sais pas faire de l’informatique’ que ‘je ne sais ni lire ni écrire’. »
D’où l’importance de mettre en place des actions de repérage et de sensibilisation à l’illettrisme auprès d’acteurs relais, comme les référents pôle emploi, les professeurs, les assistantes sociales ou encore les médecins.
« Certains patients ne savent par exemple pas lire l’ordonnance donnée. Une fois repérés, ils sont ensuite orientés par le personnel de santé vers Mots & Merveilles.
Nous mettons également beaucoup d’actions en place en faveur des enfants. Dans les écoles maternelles par exemple, des bénévoles amènent une malle de livres pour des lectures individuelles. Parfois, ce sont leurs parents qui viennent nous voir. »
Avec 17 salariés et 291 bénévoles, l’association Mots & Merveilles est présente dans sept communes de la Sambre-Avesnois. En 2017, ce sont 754 personnes qui ont été suivies, dont 678 adultes.
« Pour certains, le livre est une découverte, pour d’autres, il est un objet de peur. Les profils de personnes en situation d’illettrisme sont multiples : s’il n’y avait qu’un profil, il y aurait une réponse et il n’y aurait plus d’illettrés.
J’ai rencontré dernièrement un papa qui m’a dit : ‘quand mon fils rentre de l’école, je mets son livre en haut du frigidaire pour ne pas qu’il l’abîme’. Une autre maman, Marie-Agnès, faisait copier à sa fille des pages de dictionnaire et de livres, quand elle était petite, parce qu’elle voulait absolument que sa fille ne soit pas comme elle. Certains ont peur que leurs enfants apprennent à lire et à écrire parce qu’ils basculent dans l’autre monde… »